« Il n’y a ni justice ni liberté lorsque l’argent est roi. » Albert Camus.
Au Maroc, l’Etat profond et ses mafieux qui ont un rôle dans l’exercice des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, et qui monopolisent les secteurs économiques et les jeux politiques, ne savent pas se diriger eux-mêmes car ils dépendent du grand capital financier apatride dont ils servent d’intermédiaires et de sous-traitants dans les affaires de ses grands monopoles, surtout français, d’abord au Maroc, ensuite sur la scène africaine pour l’écoulement des surplus, le contrôle de nouvelles sphères d’investissement, ainsi que l’approvisionnement en matières premières. D’où l’isolement des classes dirigeantes du reste de la population marocaine.
Cette dualité de la société marocaine est due à des lois dualistes que le pouvoir y a instituées. Celui-ci a voulu former une caste à part qui prétend régir tous les marocains. Il sème la haine et la discorde parmi les hommes en cherchant querelle au peuple marocain afin que celui-ci ne puisse se défendre. Le pouvoir se permet d’accuser tous les protestataires du Rif de séparatistes et les manifestants des autres régions du Maroc de casseurs, de fauteurs de troubles de l’ordre public, de la sécurité publique et du bon fonctionnement des services publics….
Dans le cadre de ces lois dualistes, le pouvoir et ses oligarques pratiquent l’injustice sous les apparences de la justice et des droits de l’homme pour se faire passer pour autrement qu’ils ne sont. Ainsi soumettent-ils le peuple à leurs caprices en lui inculquant ses défauts mystificateurs pour l’abrutir. Et, si le peuple est irrésolu, s’il hésite et tâtonne, s’il ne sait pas ce qu’il veut, cette incertitude il la doit au pouvoir qui l’a soigneusement entretenu en lui faisant de vagues promesses, en lui donnant l’exemple de l’incohérence et du désordre. Le pouvoir parle au peuple de justice et il le poursuit injustement, il le condamne chaque fois qu’il croit à la justice et essaie de la réaliser pour son compte.
Les parvenus, les usuriers et les usurpateurs du pouvoir sont responsables des misères du peuple marocain, de ses tares morales et physiques. Ils sont responsables de la corruption généralisée pour ne pas dire institutionnalisée, des crimes et de la délinquance que nous avons à déplorer et qu’ils ne réparent pas. Face à cela, le peuple marocain prendra-t-il un jour conscience de sa force et de prendre sa destinée en main ou va-t-il continuer à se laisser prendre aux gestes des politiciens qui sont au service des mafieux et des parvenus du pouvoir ? L’apprentissage de la vie et de la liberté qui est long va-t-il permettre au peuple marocain de se délivrer des défauts mystificateurs de ses classes dirigeantes qui lui vantent l’utilité du préjugé, du mensonge, nécessaires à l’entretien de l’ignorance et au soutien des institutions. Bref, à l’existence de la société.
Les classes dirigeantes au Maroc nient le progrès qui détruit les erreurs et les mythes sur lesquels repose l’édifice social. Pour les dirigeants privilégiés, le peuple doit rester courbé sous leur joug car s’il s’émancipe, la société et son ordre établi ne peuvent durer. Mais le peuple a-t-il assez d’être sacrifié au profit des classes dirigeantes ? Va-t-il continuer à écouter les promesses de celles-ci qui lui font espérer qu’elles lui apporteront des réformes pour qu’il ne songe pas à les obtenir par ses propres moyens ? Le pouvoir et ses politiciens s’évertuent à retarder le changement de l’ordre socio-économique fondé sur les intérêts étroits : l’usure, l’usurpation, la corruption, le détournement des deniers publics et la fuite des capitaux.
En bref, force est de constater queles travailleurs, les classes moyennes et autres chefs de P.M.E et P.M.I d’une part, le pouvoir et ses classes dirigeantes d’autre part, n’ont pas les mêmes intérêts à défendre. Dès lors, qui l’emportera des oppresseurs et des opprimés ?
Les oppresseurs qui ne conçoivent le progrès que sous forme d’iniquités et de déformations équivoques et qui ne s’agitent que pour dominer le plus longtemps possible, demain ils ne seront sûrement et inéluctablement que des résidus balayés par la démocratie vivante.
Saïd CHATAR
Bruxelles